Trames
6 au 24 septembre 2012
Richard BATTERHAM
Céramiste
Xavier LAMBOURS
Photographe
Maija LAVONEN
Designer
Cette exposition « Trames » réunit trois artistes : un céramiste, une designer et un photographe. Chacun dans son domaine et à sa manière, tisse une trame.
Richard BATTERHAM imprime son sillon dans la terre, tisse son œuvre comme une grande toile faite de séquences répétitives.
Maija Lavonen tisse la lumière. Elle crée une trame subtile entre fils de lin, fibres optiques et fils de cuivre, qui se transforme en sculpture lumineuse.
Xavier Lambours, photographe qui échappe à toute classification, tisse pourtant une trame,autour de « sa quête de gens extraordinaires ».
Article de Jean Pierre Thibaudat sur la rencontre Batterham-Lambourg :
Belle rencontre entre le potier Richard Batterham et le photographe Xavier Lambours
Publié le 11/09/2012 à 10h05
Portrait de Richard Batterham dans sa maison-atelier du Dorset (Xavier Lambours)
C’est un homme qui ressemble à un pot. Ou à une théière. Ou à un pichet. Autant de pièces façonnées par ses mains qui font corps avec lui. Cet homme, le potier anglais Richard Batterham, expose en France pour la première fois. C’est la première fois aussi que l’on voit le photographe Xavier Lambours s’adonner à ce que l’on pourrait nommer la nature morte photographique en plaçant sous son objectif, non des individus ou des stars mais les céramiques tournées par le potier anglais.
Belle rencontre dont on peut voir le précipité dans une maison du XIVe arrondissement, près de la porte d’Orléans.
L’humble et orgueilleux artisan du Dorset
Une porte étroite, il faut sonner, sonner encore, insister. Une femme, tôt ou tard, finit par vous ouvrir. C’est sa maison. Ce n’est pas une galerie. C’est une demeure discrète mais accueillante dont le calme aménagement est en accord parfait avec le travail de Richard Batterham d’une rigoureuse et cinglante simplicité et avec la délicatesse que Xavier Lambours porte sur lui.
Le jour du vernissage de cette exposition titrée « Trames », le potier anglais était là. Grand, peau délicate et que l’on devine douce comme l’émail dont il recouvre ses pièces, les cheveux blancs duveteux qu’un moindre souffle ébouriffe, Richard Batterham est un bel escogriffe. Ses bols, ses jarres, ses inimitables pots couverts semblent veiller sur lui. Accordés à son regard, lumineux.
Batterham quitte rarement le Dorset où il est né, où il a suivi les cours d’une école d’art et où il s’est installé à la fin des années 50 après avoir séjourné deux ans à Saint-Ives chez Bernard Leach, homme devenu légende. Les termes « disciple », « élève » ou « artiste » font sourire ou pester la modestie mais aussi l’orgueil de notre artisan du Dorset
modestie mais aussi l’orgueil de notre artisan du Dorset.
Sur chaque pièce anonyme, sa griffe
Ne cherchez pas sa signature au bas de ses pièces, pourtant toujours uniques dans leur multiplicité. Le feu, cet art de l’imprévisible, est le meilleur ami du potier après la main de l’homme qui a charrié, malaxé, tourné et enfin griffé la terre. Batterham a façonné des milliers de théières, des « Tall flutted bottles » en série, des bols en veux-tu en voilà encore, mais chaque pièce porte sa griffe.
Disposées sur les trois étages de cette demeure parisienne ponctuée de meubles en bois sombre venus d’Extrême orient, les œuvres de Batterham sont à leur place dans cet environnement agrémenté au rez-de-chaussée d’un puits de lumière zénithale. L’Extrême orient est comme leur regain, leur arrière-pays. Même si ces pays-là (Chine, Japon, Corée), le potier du Dorset n’y a jamais mis les pieds. A quoi bon, puisque la terre, les glaçures, les cendres habitent à deux pas de chez lui.
Ici, sur une table, trois vases comme trois grâces. Tout en haut de ce buffet deux coupes affirmées qu’il faut prendre en main pour en mesurer l’épaisseur, l’une aux ocres irisés, l’autre aux noirs comme épris de lumière. Et tout en bas une enfilade de pots couverts minuscules. Pas de rupture entre le haut et le bas, mais l’amitié d’une filiation. Les grandes pièces ont des lignes plus amples, une rigueur d’ensemble plus affirmée, mais les petites pièces semblent plus concentrées autour de leur secret.
Dans le vaste espace du sous-sol privé de lumière naturelle, l’éclairage électrique met en valeur les stries, les angles, les boutons au cou coupé et les retraits de terre achevés d’un geste net du couteau qui sont propres au travail de Batterham. Quelle beauté que ces grands plats circulaires au céladon délicat, balafrés d’une griffe comme un paraphe. Pas de fioritures, pas de pis-aller ornemental, l’évidence se suffit à elle-même.
Xavier Lambours magicien du IPhone4
Xavier Lambours est arrivé un peu plus tard au vernissage. Il avait à la main sur son IPhone 4 et c’est avec cela qu’il a immortalisé la soirée. Comme cette photo de Batterham avec le potier de Saint-Dié, Thiébaud Chagué (qui exposait récemment à la Piscine de Roubaix). Chagué a séjourné quelques mois dans l’atelier de Batterham il y a plus de trente ans. Leur complicité a perduré.
La rencontre entre le photographe français et le potier anglais est beaucoup plus récente. Au plus, quelques mois. En photographiant le monde du cinéma ou de la politique dans de denses bricolages voués au clair-obscur du noir-et-blanc argentique, Lambours s’est vite fait connaître par des portraits de célébrités inoubliables. Mais qui aurait pu penser qu’il tomberait amoureux d’une théière ou d’une coupe jusqu’à les photographier avec un tact qui confine à l’amour ?
C’est pourtant ce qui s’est passé lorsqu’une main amie l’a conduit dans le Dorset chez Batterham. Entre les deux hommes, séparés par deux ou trois générations, quelque chose s’est passé, une histoire de regard peut-être. Le potier anglais a ouvert les portes de son atelier au photographe français et l’a laissé fureter. Il n’en est pas tout à fait revenu.
Une théière comme un Vermeer
Le voici s’arrêtant avec son IPhone 4 devant une théière de Batterham, un tas de journaux, une fenêtre, une planche de l’atelier où sèchent les pièces. De cet appareil qui n’est pas prioritairement photographique, Lambours s’approprie les imperfections et les limites pour les détourner.
Il a toujours aimé bricoler et bidouiller et continue à le faire sur son ordinateur. Puis tire lui-même ses clichés du Dorset sur un rare papier japonais. Le résultat est fabuleux, voluptueux. Photographiés par Lambours, telle théière, tel pot de Batterham, semblent sortis de tableaux de Vermeer.
Le photographe français ignorait tout de la céramique. Il a suffi qu’il entre dans l’atelier du potier anglais pour bouleverser sa façon de photographier. Fiévreux instinctif, Xavier Lambours a comme saisi dans les pièces à la fois modestes et nobles de Richard Batterham, leur part d’éternité. Belle rencontre.
Dans le cadre de l’exposition « Trames », Emilie Gastaud présente son premier album «Dansons avec les cordes ». Elle y mêle, sur le thème de la danse, pièces musicales et textes littéraires. Les textes choisis, dits par le comédien André Dussollier, ont inspirés les compositeurs. Le futur projet d’Emilie : monter un spectacle vivant qui réunirait danseurs, comédiens et musiciens.
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Toujours dans le cadre de l’exposition « Trames »,
Bertrand Renaudin et Andras Vigh proposent un parcours à travers l’Europe centrale (Hongrie, Roumanie…) au rythme d’une musique entre folklore et jazz; deux personnalités, deux cultures différentes : une osmose où le bonheur de jouer ensemble est sans cesse palpable.
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